mercredi 3 mai 2017

L’abbé Jean Labeaume, créateur de l’aérodrome de St Jean d’Avelanne

Jean Labeaume est né en 1906 à la Côte-Saint-André, le pays d’Hector Berlioz. Dans sa famille aussi, on est musicien. Sa mère, cantatrice, a été l’élève du compositeur Vincent d’Indy, mais elle a arrêté sa carrière à son mariage. Sa sœur Anne-Marie, de quatre ans son aînée, élève de José Iturbi à Genève, commencera une carrière de pianiste, mais y renoncera également pour se consacrer à l’enseignement, dans les Ordres. Jean Labeaume , devenu adulte, se tourne également vers l’Église, et c’est à la Côte-Saint-André qu’il dit sa première messe. Mais il ne conçoit pas son sacerdoce sans une ouverture à la musique. Avec sa sœur, il montera une chorale et il sera, des années plus tard un des premiers à équiper son église d’un orgue électrique. Outre les arts, il s’intéresse aussi aux techniques et à de nombreuses activités qu’il veut proposer à la jeunesse. En 1936 il est nommé à Saint Jean d’Avelanne, une petite commune située près de Pont-de-Beauvoisin, aux confins de l’Isère et de la Savoie, et il y fonde un patronage. En 1944, c’est en participant aux combats de Maurienne qu’il noue des amitiés chez les militaires du génie, amitiés qui lui seront très utiles quelques années plus tard.
Au début des années 50, il prend son baptême de l’air avec Henri Giraud sur le terrain de Grenoble-Eybens. Une passion nouvelle est née, et il apprend le pilotage, obtenant son brevet quelques mois plus tard. Le 30 décembre 1952, il fonde avec ses ouailles un aéro-club, section aérienne de son association d’éducation populaire, « L’Espérance de Saint-Jean d’Avelanne ». Mais le club ne possède ni terrain, ni avion, ni trésorerie.
Entreprenant et persuasif, il obtient qu’un bout de terrain marécageux, s’étendant au pied du village vers la voie ferrée, soit cédé à l’association. Il faut encore assécher le marais et les terres en friche. On passe une convention avec le Génie, et très vite c’est un engin de cette arme qui vient niveler le terrain. On pose des drains, on comble des fossés et on arase les bosses, et le marais recule, laissant l’espace nécessaire pour créer une piste de 400 m de long et de 35 m de large.
Lors de l’inauguration de l’aérodrome, l’abbé Labeaume célèbre une messe sur le parking avion, et c’est Mgr Fougerat, évêque de Grenoble, qui vient bénir le terrain.
En seulement deux années, arrivent trois appareils : un Praga Baby d’origine tchèque, un Jodel D112 et un Auster. Près de la route d’accès, un hangar Rouméas, affecté par l’État, est monté en un jour ! Saint Jean d’Avelanne n’est qu’une petite commune de 540 habitants dans ces années-là (900 de nos jours), mais les bonnes volontés affluent et de nombreux pilotes sont formés.
Dans les registres de l’Aviation Civile, on trouve aussi basé là un Potez 36/14 F-ALAM et ex F-AMAL, appartenant à l’Aéro-Club du Dauphiné, section « L’Espérance de Saint-Jean d’Avelanne ». On peut donc supposer que l’aide d’Henri Giraud ne fut pas négligeable.
Le 7 septembre 1959, un meeting est organisé à St Jean, et plus de 4.000 spectateurs viennent y assister.
Par la suite, l’abbé Labeaume fera édifier tout un ensemble sportif, avec terrain de football et piste d’athlétisme, à côté de « son » aérodrome. Il installera aussi un atelier offset dans une pièce de son presbytère. Il décédera en novembre 1981, et un Rallye viendra survoler son enterrement.
De nos jours, l’aérodrome de Saint Jean d’Avelanne existe toujours, mais il est plutôt dédié aux ULM. Les pilotes d’avion, eux, doivent pour le fréquenter posséder une qualification montagne ou une autorisation de site. Mais qui sait, en y posant les roues, que ce terrain privé est la propriété de « L’Espérance de Saint-Jean d’Avelanne » ? Comme quoi les voies (aériennes) du Seigneur ne sont pas toujours impénétrables... JNV mai 2017