jeudi 19 janvier 2012

Arrosage aux « Ailes »

Août 1938.

Les nouveaux brevetés pilote 1er degré de la Section d'Aviation Populaire, dont j'étais le dernier, décident un arrosage commun en grand. Une soirée-repas au café-restaurant « Les Ailes », tenu à l'époque par deux sœurs, très gentilles et maternelles. Nous étions leur adoration.

Pour ce repas sont présents des membres du comité, Murzon, Zoldi.

M.Zoldi, tailleur place St Léger, père de mon ami Bruno, est un antifasciste notoire, réfugié à Chambéry dès l'intronisation de Mussolini en Italie en 1924. Il rentrera avec joie en Italie dès la première chute de Mussolini en 44, mais sera fusillé après le retour du Duce délivré par les Allemands au Mt Cassino.

Revenons à notre repas. Très bonne ambiance, très gaie, survoltée même. Comme nous sommes dans la maison comme chez nous, quelqu'un a chipé une bouteille de liqueur d'absinthe et en a arrosé la superbe salade maison. Le restant de la bouteille est passé en douce dans la plupart de nos verres de vin rouge. Nous sommes une vingtaine avec les jeunes en école.

Les choses dégénèrent, c'est la fin du repas, des verres d'eau partent à la figure des gens. La riposte nous amène dans la salle du café et au comptoir qui est tour à tour occupé par l'un des groupes, car curieusement nous sommes en deux camps, bien distincts. Mais il y a aussi les timides qui ne participent pas, dont je suis, et qui se partagent entre les deux demoiselles restauratrices et les assaillants.iance, très gaie, survoltée même. Comme nous sommes dans la maison comme chez nous, quelqu'un a chipé une bouteille de liqueur d'absinthe et en a arrosé la superbe salade maison. Le restant de la bouteille est passé en douce dans la plupart de nos verres de vin rouge. Nous sommes une vingtaine avec les jeunes en école.

Ceux-ci veulent en découdre avec Hallotier (ndlr : le moniteur avion) et Duplan (ndlr : le mécanicien avion), grands chefs du premier clan. Les autres, plus nombreux, marquent des points et les délogent du café. Ils se r

eplient dans le jardin potager, sur le côté, bien tenu, avec de grandes allées. Au fond un poste d'eau, des seaux. Tout ce qu'il faut pour une offensive de style.

Les seaux arrivent, le restaurant est inondé. On finit par tous capituler, rire un bon coup, regarder autour, évaluer, réconforter nos restauratrices et se partager le travail de remise en ordre. On a travaillé au moins deux heures, à quinze.A part le plafond et les murs assez détrempés qui ont séché dans la matinée qui suit, tout était parfaitement remis en état.

Nos logeuses rassurées décident de faire coucher à l'hôtel les plus éloignés et les plus fidèles, restés à leur chevet dans ces moments difficiles. C'est ainsi que j'ai passé la première nuit chambérienne hors du domicile parental. Agréable nuit, repos absolu, sans rêve, dont je me réveille tout intrigué de me trou

ver là. En-dessous, au restaurant, un petit déjeuner copieux nous attend, il est 8h30.

Les Luciole ronronnent au-dessus de nous. Vite, allons faire une heure de vol...

Raconté par Louis Piaguet en juin 2005

Les Ailes 70 ans plus tard: